Allégorie de l’agriculture
À l’endos du billet de 1$ de 1935 et de 1937, soit la coupure la plus importante en quantité et la plus couramment utilisé, quoi de mieux comme allégorie que celle de l’agriculture!
L’agriculture est l’aspect le plus important historiquement dans l’édification de l’économie et de la culture sociale de nombreuses régions canadiennes et continue de l’être dans les régions de l’Ouest (veuillez noter que tout au long du texte, le présent est employé pour décrire les années 1930).
Ce faisant, l’agriculture est un élément majoritairement important dans diverses régions du Canada; la promotion de celle-ci est donc un aspect important à la fondation d’une culture canadienne et l’unification des différents peuples au sein du dominion.
À des fins d’analyse, l’illustration sera divisée en trois sections distinctes, soit le 1er plan occupé par la femme et les outils qu’elle tient entre les mains, soit le 2em plan occupé par le trône et les deux tas de produits agricoles locaux, soit le 3em plan occupé par les feuillages. D’abord, le 1er plan (zone en jaune sur l’image) est constitué de la femme et des outils qu’elle tient entre les mains.
Le choix d’une femme pour représenter l’allégorie de l’agriculture est un choix judicieux compte tenu du fait que les femmes représentent la fertilité et la création de la vie, soit les même souhaits et désirs que semble offrir cette représentation aux canadiens. Les outils que la femme tient entre ses mains représentent le travail et l’ingéniosité nécessaire pour la production agricole. Ensuite, le 2em plan (zone en vert sur l’image) est constitué du trône au centre, représentant un signe de domination et une prédominance de l’importance de quiconque qui y siège, du tas de produits agricole à gauche du trône et d’une corne d’abondance débordante de produit du côté droit du trône.
Dans cette scène, il est donc véhiculé, par le biais du trône, que l’agriculture est quelque chose d’important et de fondamental pour la culture canadienne en cours d’édification.
De plus, l’abondance des rendements agricoles est représentée par de généreux boisseaux de blé et par une corne d’abondance débordante de grosses pommes et de ce qui semble être de quelconques cucurbitacées.
Pour finir, le 3em plan (zone en bleu sur l’image) est constitué d’un dense fourrage de feuilles d’arbres à fruit et l’on peut y voir ponctuellement des fruits tels que des pommes, des poires et des pêches, soit des fruits qui pousse dans certaines régions du Canada. Bien que le 3em plan joue surtout un rôle de remplissage de l’espace, il permet d’ajouter à la scène davantage d’abondance et de marquer encore plus la présence des produits agricoles canadiens.
Pour les canadas centraux (actuel Ontario et actuel Québec), l’agriculture a été, pour la dernière moitié du XIXe, un élément moteur à l’accroissement de la richesse de ces régions et permet surtout l’augmentation massive de la population et du coup, permettant donc un plus grand étalement/répartition de la population sur le territoire.
Ce faisant, le succès de l’agriculture dans les canadas et ensuite, dans le Canada central (changement de nom en 1840 pour le Canada-uni puisque le Haut-Canada et le Bas-Canada changent de nom pour devenir une seule entité et changement de nom à nouveau en 1867 pour devenir deux provinces distinctes au sein de la même fédération) est un élément marquant et important pour ces sociétés où la richesse, la main-d’œuvre et la culture y trouvent tous leur souche. Avec les terres agricoles encore fraîche du nord des Grands Lacs et les terres agricoles canadiennes françaises produisant désormais de l’avoine pour l’élevage de bétail et pour vendre à l’industrie de la coupe de bois (les chevaux sur les exploitations forestières nécessitaient énormément d’avoine pour travailler), les revenus sont donc intéressants pour ceux-ci malgré l’appauvrissement du sol des terres des basses-terres du Saint-Laurent à cause de quelques siècles d’exploitation.
Ce faisant, le Canada central est rejoint et concerné par le message véhiculé par l’allégorie de l’agriculture. Ayant davantage de portée qu’au Canada central, l’agriculture est fondamentale pour l’Ouest canadien nouvellement développé et en cours de peuplement. Avec la campagne de publicité en Europe pour encourager l’immigration, le slogan the last best west (image #3) représente bien la réalité de cette époque. Faisant référence aux États-Unis, the last best west fait donc la promotion des prairies canadiennes comme étant le dernier endroit en Amérique où l’on peut retrouver des terres agricoles vierges, rentables et à peu près gratuite.
Ce basant donc complètement sur l’expérience et la réputation de la campagne de peuplement de l’Ouest américain, le Canada attire les immigrants en présentant les succès encourus par certains aux États-Unis et ce, en proposant d’avantage d’encadrement et de sécurité par une mise en place des municipalités et par l’envoie de nombreux agents de la Gendarmerie, évitant donc le banditisme et les hors-la-loi comme ce fût le cas dans des régions isolés de l’Ouest américain.
À part les régions des maritimes qui importent le blé qu’ils consomment et qui sont d’avantage occupées par le commerce et la pêche, presque tout le nouveau Canada se sent concerné par cette promotion allégorique des succès et rendements agricoles, permettant donc une forme de rapprochement culturel entre les diverses régions du dominion; le constructivisme social basé sur les ressemblances déjà acquises aux diverses unités à enculturer est la forme la plus solide d’une construction culturelle.
Sources :
Banque du Canada. (2006). L’œuvre artistique dans les
billets de banque canadiens. Ottawa. Canada
Graham, R. J. (2017). A Charlton Standard Catalogue;
Canadian Government Paper Money. 29em édition, The
Charlton Press. Toronto. Canada. 424 p.
Linteau, Paul-André. (2014). Que Sais-je?; Histoire du Canada.
5em édition. Paris. France. 126 p.